Laisser émerger l’être de votre vie
L’être est là, dans tout ce que vous faites comme dans ce que vous êtes. Mais il est là, pas dans votre réalité ordinaire, car il ne peut encore s’exprimer. Il ne peut pas encore s’exprimer car autre chose interfère sans cesse dans votre monde afin de le déplacer dans un deuxième plan, dans lequel vous ne pouvez plus, hélas, en avoir conscience.
En effet, on ne peut avoir conscience seulement de l’expression du personnage à travers le courant mental qui remplit constamment l’espace de notre conscience. La projection incessante de ce courant mental alimente la structure même de notre personnalité, lui donnant ainsi toute la place et tout l’espace de ce que nous pouvons vivre ici-bas.
La conscience, tant qu’elle fera l’expérience incessante de la personnalité, ne pourra accéder à l’émergence de l’être, puisqu’il n’a finalement jamais la place pour pouvoir commencer à émerger. Vous ne pouvez laisser émerger l’être de votre vie car autre chose émerge sans cesse et c’est là où tout se joue réellement, dans cette émergence exotique, étrangère.
La conscience n’a pas conscience de tout ce processus et laisse alors ce processus agir par lui-même. Comme il a fini par devenir habituel, automatique et donc prépondérant, il est devenu comme naturel, comme allant de soi. Le flot de la conscience est sans cesse en mouvement mais ce mouvement peut donner l’apparence d’un flux naturel, pour acheminer la conscience dans une réalité toute artificielle. Et c’est à partir de cette dynamique incessante que la conscience s’ancre dans un autre flux.
Une fois que la conscience est établie dans ce flot artificiel, il n’y a plus de place pour le flot naturel de l’être et donc plus d’espace d’expression pour l’être de votre être. Comme il n’y a plus de possibilité à l’être d’émerger spontanément dans votre monde qui est dans votre conscience, alors s’établit une réalité qui n’existe pas mais qui, paradoxalement, emprisonne la conscience dans un flux étranger qui donne à la réalité l’apparence de pouvoir y exister.
Pourtant dans cette structure illusoire, rien n’existe concrètement, mais seulement, grâce à l’attention donnée, et donc à ce consentement induit de tout ce qui se trame, en soi, cela semble bien réel. La conscience perdue dans ce flux éphémère n’a plus de possibilité pour expérimenter une réalité authentique, soit une réalité issue de son être réel.
La conscience face à cette dichotomie est perdue, car elle hère dans la partie coupée d’elle-même et, ne pouvant accéder de nouveau à sa partie réelle, elle cherche, comme elle peut, des moyens pour pouvoir enfin s’y exprimer. Son expression est pourtant bien réelle, authentique, spontanée face à l’expression qui se trouve aux antipodes de la personnalité. Puisqu’elle est réfléchie, et pour cela, elle a besoin du temps pour établir toute une construction mentale afin de faire croire que ce qu’elle fait a du sens.
Ainsi, à travers le courant mental, la personnalité établit toute une falsification d’elle-même, pour se donner de l’importance et donc du poids face à tout ce qu’elle vit. Mais il reste irrémédiablement une vaste chimère, un ersatz de ce qui est et donc de ce qui émerge spontanément en soi.
Pourtant cette réalité essentielle est le terreau même d’où nous émergeons sans cesse et nous pouvons, quand nous le comprenons, lui donner de la place et de l’espace pour en faire de nouveau l’expérience. C’est finalement à travers son expérimentation que nous commençons à le laisser naitre dans notre réalité de tous les jours.
Il peut émerger dans notre réalité onirique, en perçant ainsi spontanément dans nos rêves. Il peut aussi émerger dans notre réalité ordinaire quand nous lui laissons de la place pour éclore dans notre expérience. Plus nous lui laissons de la place dans notre expérience, et plus nous comprenons alors le rapport réel qu’il y a entre ce qui est, et ce qui n’est pas.
Il est l’essence même de tout ce que nous sommes et le laisser émerger dans notre expérience de tous les jours permet d’ancrer sa réalité essentielle et spontanée dans notre monde du dehors. Dehors bien souvent, nous ne savons que faire l’expérience de notre personnalité car dedans, nous sommes sans cesse remplis par le courant mental de ce monde illusoire.
Ce courant issu de l’astral crée l’illusion dans laquelle nous nous perdons car à ce niveau nous ne savons plus qu’exister à travers l’idée qui nous gouverne en s’interférant constamment à l’intérieur de notre conscience. Ainsi, dans le monde du dehors, ne peut qu’émerger l’idée que l’on se fait de notre personnalité, tout en nous empêchant ainsi de faire l’expérience réelle de l’être qui est sans cesse mis de côté.
Il est mis de côté mais il reste là, constamment, puisqu’il est ce jet même qui nous permet d’être là où nous sommes. Quand nous percevons l’interférence mentale comme moyen d’appropriation de notre expérience, alors on découvre que ce flux mental est concrètement étranger au flot naturel de l’être qui se déploie dans le silence le plus total.
C’est pour cela qu’il n’y a plus de place pour le silence dans notre vie. C’est pour cela qu’il n’y a plus de place pour le vide car le plein a réussi à nous faire croire que la réalité ne peut s’expérimenter que dans son remplissement incessant.
C’est là où l’école du vide devient une école du silence, pour nous apprendre à redonner du vide et donc du silence en soi, afin de pouvoir laisser émerger l’être de la vie. C’est dans ce processus que l’on apprend à prendre de la distance avec tout ce qui nous remplit et nous oriente dans des flux irréels et donc dans des réalités toutes paradoxales afin de nous y incarcérer à jamais dedans.
C’est bien ce qui nous remplit mentalement qui nous piège, car le flux naturel et silencieux de l’être est remplacé par un flux mental qui remplit la conscience d’une trame de sens et de signification qui établit et alimente la structure de la personnalité. Cette personnalité devient alors l’interface de ce qui nous manipule car la voix intérieure donne un sens et donc une signification toute irréelle à tout ce que l’on vit.
Dans son monde mécaniste et artificiel, il n’y a plus rien de spontané, puisque tout est calculé pour perdre la conscience dans une expérience falsifiée et surajoutée. C’est cette couche mentale qui permet cette disjonction du flux naturel de l’être puisqu’il arrive à l’orienter à travers la trame de l’histoire qui lui est racontée vers d’autres contrées.
Mais la trame naturelle peut à tout moment apparaitre quand la conscience s’ouvre à d’autres moyens de vivre son existence. C’est en cela que l’école du vide devient si essentielle à connaitre car cela permet de pouvoir tendre à nouveau vers cette trame authentique, afin de pouvoir ensuite en gouter toute son expérience et d’en tirer tout son suc vivifiant.