L’expérience directe de la découverte de soi
Nous vivons dans une dynamique d’inconscience où tout est fait pour que nous n’ayons jamais conscience de ce qui se passe en nous. Pourtant, nous avons bien conscience de quelque chose puisque nous nous en rendons compte. Cette conscience limitée que nous avons actuellement s’alimente exclusivement des informations du mental, parce que toutes les autres informations disponibles ne sont plus reçues et donc utilisées.
Cette conscience en nous n’existe seulement qu’à travers les flux et reflux de cet océan mental, car toute l’information qui lui parvient ne provient que de ce chant qui le berce depuis son adolescence. Ceci est important à intégrer afin de découvrir que nous délaissons d’autres flux informationnels qui nous permettraient alors d’entrevoir toute l’interférence qui se joue en nous et donc tout le principe même de notre parasitage continu.
Au départ de notre vie, l’enfant ne pense pas, il ne fait que jouer et rigoler avec ses amis, avec sa famille et s’émerveille de tout ce qu’il découvre. Il est dans un état d’ouverture totale. Il est présent absolument à tout, car tout est là pour l’aider à grandir dans ce nouvel environnement. Puis un jour, à force d’être avec le monde, il va commencer à penser, à réfléchir et donc c’est comme s’il s’était branché au même flux mental collectif afin de devenir comme tout le monde.
Pourtant, dans son enfance, il était totalement conscient de tout ce qui se passait à chaque instant. Il était complètement ouvert à chaque expérience et, dans cette ouverture, dans cette conscience, dans cette présence, il pouvait tout comprendre intuitivement et n’avait pas besoin de concept ou même de structure mentale qui se superpose à lui pour pouvoir interpréter le monde.
Cette structure mentale s’est transformée, ensuite, en sa seule base de référence. Puisqu’elle est sans cesse alimentée par un flux incessant de pensées qui l’actualisent, il n’y a plus de place pour recevoir d’autres informations. Elle est devenue, finalement le prisme par lequel nous décodons le monde et tout se moule exactement à elle, à travers tout ce que nous percevons. Ainsi, nous ne regardons plus le monde tel qu’il est, mais toujours comme nous l’imaginons.
Cette image en nous interfère la réalité pour la transformer et la moduler au prisme de toutes nos conceptions mentales. Ainsi, nous ne faisons plus l’expérience réelle du monde, nous n’en faisons qu’une expérience mentale, à travers toutes les images qui la colorent et la transforment.
Nous coupons, hélas, toute la richesse de notre vie, car nous nous fermons à tout ce qu’elle a à nous apprendre sur nous. Comme elle est finalement l’expression de ce que nous sommes, nous nous fermons à jamais à nous-mêmes. Nous bloquons l’expérience directe de la découverte de soi, puisque l’extérieur étant toujours la projection de l’intérieur, il est là pour nous montrer tout ce que nous n’avons pas réussi encore à découvrir de nous.
À force de délaisser l’expérience réelle du monde, nous avons fini par croire que notre manière d’être au monde, toute superficielle, ne pouvait pas être autrement et qu’elle était, finalement, une expérience authentique du monde. Là, enfermés dans cette illusion, coupés de soi, car segmentés en nous-mêmes à travers une structure irréelle que nous prenons pour nous-mêmes, nous ne sommes plus aptes à comprendre réellement ce que l’on vit. Puisque ce qui vit en nous est comme débranché de sa propre source et donc d’une compréhension authentique de ce qu’il vit.
Nous sommes alors seulement aptes à nous illusionner, à croire que ce que l’on vit est bien réel, important, terre à terre. À travers toute cette illusion, nous faisons mille et une choses dans nos vies sans jamais comprendre que ce que nous faisons nous perd sans cesse dans un processus de non-être, une dynamique qui nous empêche d’être réellement soi-même.
Nous créons alors des attentes et des désirs qui nous font croire que nous pourrions, une fois assouvies, nous rendre mieux, afin d’atteindre ce merveilleux bonheur tant désiré. Hélas, tout ce mode de fonctionnement ne peut pas nous rendre heureux, car comme nous vivons seulement à travers des illusions, tout ce que l’on croit est faux, tout ce que l’on désire est inutile, tout ce que l’on attend est futile. Toutes ces illusions nous perdent dans un état d’être à jamais clair, à jamais serein et pire, nous vivons dans un état de guerre, d’attente et donc toute notre vie est élancée, projetée dans un chaos flamboyant.
Ce chaos engendre le mal-être qui sert le système. C’est ce chaos qu’il faut entrevoir pour comprendre ce qui le génère afin de pouvoir le dépasser. Seul le chaos existe en ce monde, car il est le moteur de cette réalité infernale. Et qu’est-ce qui génère tout ce chaos en l’être, c’est tout ce qu’il croit, tout ce qu’il juge de bon ou mauvais, et qui deviendra alors le moteur de toutes ses actions et combats à venir. L’être en ce monde est sans cesse en guerre et tant qu’il projettera cette guerre à l’extérieur, il ne pourra jamais vivre sa propre guerre sainte qui est sans cesse à l’intérieur.
L’extérieur est devenu le piège de toutes les projections des êtres, car ainsi, toute cette extériorité empêche chacun d’affronter ces propres démons à l’intérieur afin de générer à l’infini toute l’énergie que le système a besoin pour alimenter cet enfer sur terre.
Seule la guerre intérieure pourra nous donner la possibilité, à travers tout l’affrontement de toutes nos parts d’ombre, de pouvoir remonter sur la véritable échelle vibratoire de l’être, à une hauteur dans laquelle il pourra enfin retrouver toute la paix de l’âme. Tant que nous restons illusionnés par toutes nos illusions qu’utilisent nos parts d’ombre, nous sommes voués à exister cloués au plus bas du champ vibratoire. C’est à cette dimension qu’ils nous utilisent comme base énergétique pour leur monde, puisque c’est ici qu’ils nous dévorent littéralement.
Nous devons apprendre à nous retrouver dans un état d’être où il n’y a plus de vains désirs, ou d’irréelles attentes, car c’est à cause de tout cela que nous ne pouvons jamais être dans les hauteurs vibratoires de notre être authentique. Comme nous sommes sans cesse dans l’attente de… nous ne sommes jamais satisfaits, et donc en paix et donc en phase avec notre vie. Alors, nous imaginons comment tendre vers ce qui nous manque, pour nous sentir entiers, vivants, et donc en paix, mais cela restera à jamais un leurre.
Cette démarche est tout illusoire, car il n’y a rien à chercher, mais juste comprendre que la recherche elle-même nous empêche d’être dans un état d’être naturel, harmonieux. C’est seulement dans cet état d’acceptation que tout va bien, que nous sommes à notre place, que nous vivons ce que nous avons besoin de vivre pour avancer, que l’on pourra alors et seulement gouter au bienêtre, d’être en phase avec soi-même puisque déphaser de ce monde illusoire qui nous dévore toujours plus.
Bienheureux, celui qui, sans désir, sans attente, sait que chaque expérience qu’il va vivre est là pour le combler de tout ce qu’il a besoin de vivre comme de tout ce qu’il a à comprendre. Mais pour cela, il devra sortir de l’étroitesse de tout ce qu’il croit pour s’ouvrir à l’incroyable, à l’impalpable, à l’inconcevable même.
L’être doit traverser tout ce non-être en lui à travers tous les étages de l’être discordants qu’il a vécu en ce monde puisque c’est à travers l’expérience même de tout son non-être qu’il va réapprendre à être à nouveau et comprendre ainsi tout ce qu’il l’en empêchait.
Être n’a pas besoin du non-être, mais le non-être, lui, ne peut s’expérimenter sans l’être. Être ou ne pas être, n’est plus la question, mais seulement le diapason de là où on se trouve dans notre vie. Soit, ce que nous vivons est en phase avec notre réalité essentielle et alors, on expérimente l’être sans attente ni désir, puisque tout est parfait à celui ou celle qui s’est retrouvé soi-même.
Ou bien, à l’opposé, on est encore enfermé à imaginer comment attendre ce bien-être, ce bonheur et alors, dans cette attente, dans cette tension, l’être sera encore confronté au bas fond de l’existence. C’est ici qu’il devra comprendre qu’il ne fait pas partie de ce monde et donc qu’il n’a plus besoin de vivre comme tout le monde, mais seulement dans l’être de son être. Ainsi, chacun, face à lui-même, devra franchir ou pas le rubicond du non-être pour être à nouveau soi-même ou pas.