Ces reflets qui forment ce labyrinthe d’images
Face à ce chaos grandissant, nous n’avons pas d’autre choix que de comprendre en soi-même l’influence de cette voie superficielle et irréelle. Cette voie, nous la prenons pour nous-mêmes, car nous ne savons pas qu’elle ne nous appartient pas. Elle est là pour nous prendre ou pour nous donner, et c’est seulement nous qui choisissons, mais ce choix ne se fait pas de la manière dont nous croyons choisir en ce monde. Ce choix est, en fait, un non-choix, un arrêt de fonctionner comme on l’a toujours fait.
Notre manière de fonctionner est instrumentalisée pour que l’on exprime sans cesse le chaos. Ce chaos en nous signe l’éclosion de ce chaos extérieur. Continuer de fonctionner comme on nous l’a si bien appris, c’est nous conformer au chaos puisque nous sommes finalement les enfants de ce chaos extrême qui nous dévore sans cesse.
Si nous restons ancrés dans cette manière de vivre, nous ne faisons qu’alimenter encore et encore ce chaos intérieur et donc obligatoirement aussi toute l’expression de ce chaos extérieur. L’expérience du vide peut devenir le moyen qui permet de ne plus réagir au chaos de ce monde et donc peut permettre d’apprendre à sortir des griffes de toute son influence.
L’influence du chaos provient du champ mental qui nous polarise à travers toutes nos réactions qui alimentent sans cesse toutes nos structures de croyances paradoxales. L’expérience du vide permet de désinhiber l’influence de notre mental, car à travers le rien, toute l’illusion qui nous gangrène insidieusement s’éclaire enfin d’une toute autre couleur et donc nous permet de goûter de manière succincte à son authentique saveur.
C’est à travers la découverte de cette saveur putride que l’on comprend ce qui se passe concrètement dans notre corps. Le chaos engendre la vieillesse, la maladie et donc la mort. Le chaos accélère l’instant présent jusqu’à l’annihiler complètement pour le remplacer finalement, dans un temps et un espace complétement éphémère.
Là, dans ce lieu qui n’existe pas comme dans ce temps qui n’existera jamais, nous nous enfermons alors dans un univers totalement irréel dont son seul but est de pouvoir quand même exister : l’espace d’un temps fugace et explosif. Alors, dans ce tout qui n’existe pas, on finit par se prendre au piège d’être pareil, identique tel un reflet ! Pris au piège par la vision de tous ces filets illusoires à travers tout ce mouvement mortel… là, dans l’oubli du réel, seul l’irréel existe, et on peut finalement se laisser aller, et même mourir d’y croire.
Ceci est la fin du jeu quand le miroir a réussi à enfermer sa propre image dedans. Mais ceci n’est qu’une guerre de reflet et voir et comprendre enfin que nous ne sommes ni le reflet et donc encore moins l’image qui s’y reflète, est l’idée écarlate. L’idée pour sortir de ce monde de reflet, et donc de ce monde de projection où les visions peuvent anéantir ce qui s’y enferment.
Mais peu importe tous ces reflets qui forment ce labyrinthe d’images, car même à travers toutes ces structures enfermantes, existe, là où il n’y a rien, toujours le royaume du vide. C’est ici, quand nos pas franchissent, sans crier gare, ce lieu, que le silence sonne alors à la porte de tous ces faux semblants. Nous ne savons pas d’où cela provient, ni même qui nous appelle. Le rien derrière tout ce trop-plein est là puisqu’il est le porteur et donc la base de tout ce qui existe et en tant que tel, il a tout pouvoir sur tout ce qui provient de lui.
Face à ce chaos grandissant, nous n’avons pas d’autres choix que de comprendre en soi-même l’influence de cette voie superficielle et irréelle afin de pouvoir entendre à nouveau, tout ce que le silence a, à nous apprendre. Apprendre à désapprendre afin de pouvoir re-goûter à nouveau toute la saveur exquise d’être en nouveau plein de vie, voilà la voie, mais pour cela, il faut apprendre comment pouvoir déverser tout ce que l’on a reçu dans ce monde de reflet et donc toute la mort et la maladie que nous avons dû imaginer prendre pour soi.
Tant que je n’ai pas vidé tout ce trop-plein de reflets et d’images qui me plombent à vivre sans cesse à genoux, je ne pourrais pas réapprendre à marcher. Comme je ne sais pas comment déverser tout ce poids qui pèse depuis si longtemps, je dois apprendre à comprendre autrement et donc m’ouvrir à d’autres perspectives.
Dans ce monde de reflet, personne ne peut m’aider, puisque tous sont perdus par leur propre reflet. Seul le vide en moi a la capacité de m’aider pour comprendre comment me vider de tout ce qui me remplit et qui me pousse à fléchir, à tomber et à force à ramper dans tous les bas fonds énergétique.
Le vide est sans reflet et c’est exactement ce que j’ai besoin de vivre. Vivre sans reflet, sans projection, sans rien d’autre que la vie qui œuvre en moi et qui me montre à travers ce que je ressens tout ce que je n’ai pu comprendre dans tous ces reflets illusoires.
Ainsi, je peux me dire que je ne suis plus l’instrument de ce chaos, mais seulement du vide qui réside en chacun de nous, et cela m’ouvre à tout ce qui me dépasse. Dépasser le chaos, c’est ne plus le prendre pour soi, mais le voir pour ce qu’il est, soit juste le passage de là où on était complètement enfermé, jusqu’à là, où on apprend à se libérer de tout ce qui se montre.
Percevoir enfin derrière les parois sensitives tout l’irréel de ce chaos afin de pouvoir faire éclore dans le silence, l’ordre et l’harmonie en soi, voilà la sève qui me nourrit. Seul le silence permet d’écouter le chant du vivant. Seul l’espace vide permet de laisser rentrer la vie à nouveau pour nous permettre de réapprendre à goûter à ce qui est essentiel et vital et délaisser alors, tout ce qui a encore un goût mortel.